mardi 18 octobre 2011

tout ce qui se passe dans la savane m'intéresse, le reste rien à foutre

La meilleure critique d'"Une vie sans Barjot" jamais écrite, trouvée par hasard sur un forum de cinoche :

La vie sans Barjot est celle d’après, une vie solitaire, diurne et grise, une vie adulte. La bd elle ne peut pas s’envisager sans lui. Barjot est le guide du présent, attaché au lieu, sans aucune prétention à un futur, à un ailleurs. D’autres se rêvent aventurier, lui l’est déjà. Son existence même est une provocation dans cette banlieue que l’on devine sans folie, rangée. Il est la pièce rapportée, le sparadrap qui trimballe son mal être derrière un paravent d’excentricité, il s’agrège et se libère sans effort apparent, il mène sa propre vie, en marge, jamais bien loin, il surgit. Lorsqu’une situation s’étire jusqu’au point de rupture, il apporte le dérèglement nécessaire pour brouiller la fin de quelque chose, d’un instant, pour le noyer dans l’illusion d’une interminable nuit colorée. Il est la réponse des auteurs dans leur dialogue avec leurs personnages, le quotidien dérisoire suffit à créer : quelque part, dans ces rues bleues et ces docks lugubres figure un Congo initiatique. Mathieu doit partir pour Paris le lendemain, expulsé trop tôt de la jeunesse par ses études, tout prêt de perdre ce qu’il n’a jamais possédé, il n’a que cette nuit. Il s’y enfonce à la suite de Barjot, navigateur erratique capable de tracer une route ponctuée par des éruptions de désir sans en connaître la fin. Avant l’aube, Mathieu doit trouver Noémie. Une déflagration de shoegaze manque de déchirer la nuit et ses rêves, la crudité jaune d’une ampoule étale sur une page un accès de torpeur adolescente, d’indécision et de renoncement. Les auteurs, jamais à court de solutions graphiques, creusent la dépression pour lui redonner un élan, laisser Mathieu se rétablir au faîte d’un mur, osciller en proie au vertige, rendre ainsi géométrique un chamboulement qui ne se laisse voir que timidement, dans un aveu brisant trois années d’espoir silencieux et ne se livre que dans un petit miracle d’insouciance, un abandon au présent.

Je ne sais pas qui est ce TaD, mais putain, parfait, mec.

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