dimanche 4 mars 2012

Smoke on the water

KINSHASA (Reuters) - Trois explosions ont secoué Brazzaville, et l'on pouvait voir une énorme fumée au-dessus de la capitale de la République du Congo dimanche matin, rapporte un témoin.

Un porte-parole du gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC), citant des sources du gouvernement de la république congolaise, a indiqué que les explosions venaient d'un dépôt de munitions situé à proximité du fleuve Congo, non loin de l'hôtel Hilton, à Brazzaville.

"Il y a eu trois énormes explosions, dont une qui a soufflé ma fenêtre il y a quelques minutes, et on a entendu ensuite toute une série de détonations moins fortes", a dit un témoin, qui vit à Kinshasa, capitale de la RDC, située à moins de dix kilomètres de Brazzaville.

A Kinshasa, la télévision publique a lancé un appel au calme à la population.

Les autorités de la république du Congo n'ont fait aucun commentaire dans l'immédiat.

vendredi 2 mars 2012

Palmarès


Le mode de fonctionnement du palmarès d'Angoulême m'a toujours paru maladroit. Le festival récompense d'une part des livres, supposés les « meilleurs » de l’année, et d'autre part un auteur, pour l’ensemble de son oeuvre. C'est à la fois le Goncourt et le Nobel, et c'est sans doute à la fois trop ambitieux et à peu près illisible par le grand public.

A quoi sert un palmarès ? A moins à donner une visibilité à un livre, j'imagine. Il s'agit de dire "le meilleur bouquin de l'année, c'est celui-là". Mais Angoulême ne peut pas se contenter de ne donner qu'un seul prix, sauf à engendrer tout un tas de frustrations (chez les éditeurs, les auteurs, les lecteurs ?), alors plutôt que fonctionner sur le mode Goncourt, le festival a choisi le mode "festival de Cannes".



A Cannes, on récompense des films, et du coup on peut multiplier les prix techniques (acteur, actrice, scénario, image, son - enfin, je ne sais plus quelles catégories sont envisagées, mais il y en a un paquet). Or en BD, ces récompenses techniques n'ont à peu près aucun sens, parce que la bd n'est pas un art industriel avec des corps de métier. Fondamentalement, récompenser le scénario d'une bande dessinée, comme le proposait le festival il y a quelques années, était une aberration, parce que le scénario, ça n'existe pas, ce n'est qu'une étape, qu'un ingrédient mal défini, dans l'élaboration d'une œuvre, disons, "une et indivisible". Le système était d’ailleurs allé assez loin dans l’absurde, puisqu’on a même récompensé parfois « les meilleurs dialogues ». On croit rêver : pourquoi pas le meilleur lettrage, les plus jolies couleurs, le meilleur emploi du subjonctif, la plus chouette couverture, et, pour satisfaire les métiers du livre, la meilleure reliure, le plus beau grain de papier ?

Angoulême a ensuite abandonné l'idée des récompenses techniques, et s'est penché sur des récompenses liées au genre ou au public visé. Sauf que ça ne marche pas non plus : les genres sont poreux, un livre ne se réduit pas au genre auquel on l'assigne, les genres sont multiples et multipliables (pourquoi un Fauve SNCF "polar" et pas un Fauve "Science-Fiction" ?), et de toute façon, il vaudrait mieux qu'un festival de genre récompense une bd de genre, ce serait plus cohérent (par exemple les Utopiales récompensant la meilleure bd de SF).

Encore une fois, la solution la plus saine, la plus cohérente, serait de ne récompenser qu’un seul livre : la meilleure bd de l’année, point barre. Ce serait simple, définitif, et extrêmement efficace du point de vue des retombées médiatiques et sans doute commerciales. Le meilleur album de bande dessinée de 2011 est « Une Vie sans Barjot ». Hop, bandeau, articles de presse, compte-rendu critique, tout le monde s’en souviendrait : « après « Pauline et les loups-garous » en 2010, c’est « Une Vie sans Barjot » qui emporte le Fauve d’Angoulême ».

Mais ce n’est pas possible, il faut satisfaire plus de monde, d’autant qu’aucun autre prix concernant la Bande Dessinée n’a un tel impact médiatique.




Trondheim avait eu la judicieuse idée de proposer, lors de sa magistrature, des prix « essentiels ». Il y avait le Fauve d’or pour le meilleur bouquin, et 5 ou 6 « essentiels ». C’était simple, et assez clair : le meilleur livre et ceux qu’il faut avoir lus pendant l’année. Pour une raison que j’ignore, ce système a été abandonné – peut-être parce que cette histoire d’ « essentiels » prêtait encore à confusion.

Alors Angoulême a retoqué un palmarès en instaurant des catégories (en plus du fauve d’or), qui ne sont ni techniques ni de genre : fauve « Regards sur le monde », fauve « Coup de cœur », des trucs comme ça. Encore plus incompréhensible : l’album fauve d’or n’est pas un « coup de cœur » ? L’album fauve d’or n’est pas un « regard sur le monde » ? Bon sang, mais il ne fallait pas lui donner le prix alors !

Outre la difficulté de comprendre ces catégories, le palmarès a un impact médiatique à peu près nul, trop de prix, trop de nominés, on ne sait plus de quoi on veut parler. Du coup, on va parler du Grand Prix, mais le GP d’Angoulême, ce n’est pas un livre mais une œuvre qui s’étale sur plusieurs années (et d’ailleurs, les « bons » livres d’un GP ne sont pas forcément les plus récents).

Les éditeurs ne peuvent même pas jouer le petit truc marketing du bandeau « nominé à Angoulême » (qui est la médaille en chocolat de ceux qui n’ont rien gagné), parce que des nominés, dans le système actuel, il y en a à la pelle : 96 nominés, cette année ! Quelle valeur peut avoir une nomination, dès lors que vous êtes presque cent à en bénéficier ?



Comment faire alors ? Hé bien, j’ai la solution (heureusement que je suis là). Voici les prix à attribuer :

- Un fauve d’or : le meilleur album de l’année, sur lequel on communique à donf et qui est évidemment la récompense suprême. Au passage, le festival d’Angoulême aurait tout intérêt à justifier clairement son choix par un communiqué critique qui présente le livre primé. (mais enfin peut-être qu’ils le font, je n’en sais rien)

- Un Fauve « premier album » : une catégorie qui existe, je crois, et qui est une des rares légitimes.

- Un Fauve « Prix de la Critique », c'est-à-dire celui de l’ACBD, qui a été évincé du festival pour une raison obscure, alors même que c’est un vrai prix, avec son jury, et qu’on le comprend.

- Un fauve « Patrimoine », comme celui qui existe déjà pour récompenser un travail d’éditeur ou de critique sur une édition patrimoniale.

- Un Fauve « Meilleur album étranger », ou, disons, meilleur album en langue étrangère traduit.

Et voilà, 5 prix, clairement distincts, facilement compréhensibles par tout le monde, pour lesquels on peut faire à chaque fois une short-list de 5 nominés. On peut garder le Grand Prix, c’est une récompense « bâton de Maréchal » qui a le mérite de créer des polémiques sans fin sur les sites spécialisés (au passage, je me réjouis que JC Denis ait été choisi cette année).

Ne me remerciez pas, je le fais pour le bien de la Bande Dessinée mondiale – mais remettez-moi un prix la prochaine fois, bordel.

mardi 28 février 2012

Kaniartitude


Le Monde (.fr) se rattrape avec un compte-rendu d'audience pas mal.


(photos Le Monde et L. Decloitre)

dimanche 26 février 2012

Chaudron, Brazza, René


Totochement i pète kartié Chaudron. Et ailleurs (jusqu'à l'Etang-Salé, bon dié !).
Le Monde (.fr) titre "Seuls les expatriés s'en sortent", laissant une partie des commentateurs pantois (qu'entend Le Monde par "expatriés" ? Les zoreils ? Les fonctionnaires ? Les *vrais* expatriés sûrement pas en tout cas), tandis que l'habituelle meute de connards commentateurs bas du front se vautre dans les propos récurrents sur "qu'on leur donne leur indépendance, ils nous coûtent trop cher" - c'est devenu un réflexe pavlovien dès qu'on parle de l'outre-mer, apparemment).


Moi, je n'ai ni eau ni électricité, alors je me suis enfui quelques jours à Brazzaville, c'était bien, bons restaus, belle vue sur Kin. D'ailleurs, si Kinshasa ignore à peu près Brazza, Brazza ne semble, elle, n'avoir d'yeux que pour sa grande voisine agitée (et un peu plus excitante, il faut en convenir).
René, quant à lui, mange des poissons.


mardi 14 février 2012

Freddy Tsimba



Freddy a deux ateliers à Matonge (à deux pas de Victoire) : une cour entourée d'une palissade de tôle, dans laquelle, entre autres, il n'en finit plus de peaufiner une sculpture monumentale représentant une bagnole sans moteur poussée par des hommes, des femmes et des enfants, le tout en petites cuillères soudées les unes aux autres, et qui fonctionne comme une allégorie d'un pays sans moteur que tout le monde tente - en vain ? - de faire avancer ; l'autre atelier est dans une petite maison, mais c'est plus l'entrepôt des oeuvres déjà terminées, et on y voit une série d'hommes sans tête, les bras en l'air contre le mur, le froc en plastique baissé, comme récent souvenir de la zone de rétention administrative de Bruxelles où échouent les migrants malchanceux du monde entier, qu'ils soient afghans, roumains ou sculpteur congolais (victime d'un cafouillage administratif typiquement Shengen).


On peut écouter Freddy des heures durant, il a plein d'anecdotes, d'histoires invraisemblables (parce que congolaises) à raconter : comment, lors de sa période de sculptures en douilles, il s'est fait arrêter à Kisangani (pour ramassage de munitions usagées, patrimoine national de l'Est de la RDC, vraisemblablement), et incarcérer plusieurs mois avant d'être enfin libéré parce qu'il avait formé ses co-détenus à la chaudronnerie à la grande satisfaction des matons.


Freddy vit au pays de Kafka, si le pays de Kafka était au centre de l'Afrique équatoriale. Son voisin est un pasteur d'une église de réveil quelconque, et comme le courant ne passe pas entre le businessman de Dieu et l'artiste rebelle, chaque matin, des prêches enflammés le désignent comme une créature du Diable.
Le Diable, je ne sais pas trop, mais l'oeuvre de Freddy Tsimba est peut-être bien le témoignage de ce que l'Enfer sur Terre n'est pas si loin.

samedi 4 février 2012

La mauvaise fièvre


Le premier jour, tout va bien, Manu et moi allons chez Bertrand et Elina, c'est sympa comme tout, et nous buvons du vin.
Le lendemain, dans le train qui nous mène à Angoulême, je sens bien comme une sorte de petite grosse fatigue, mais j'accuse le vin, la Sabena, le putain de froid, bref les suspects habituels.
Ensuite, ça dégénère rapidement : je suis à Angoulême, mais les fièvres africaines m'ont rattrapé, je dors comme une merde dans la petite chambre de l'hôtel d'Orléans au lieu d'aller voir les copains, je sue comme un goret alors qu'il fait visiblement - 25° dehors, puis je me pèle, puis je dors etc.
Finalement, samedi, je me traîne aux urgences de la ville, qui rechignent au départ à me recevoir, et mon auto-diagnostic confirmé (un palu donc), je peux continuer mon séjour charentais dans les mêmes conditions : fièvre, fatigue extrême, froid, pays de merde.
J'accompagne quand même Stéphane à la remise des prix, je prépare un petit discours mentalement, plein de saillies et d'esprit au sujet de la malaria, pour recevoir mon fauve d'or, et je regarde Guy se lever et recevoir le prix à notre place.
Je fièvre et comate encore un peu dans l'avion du retour, puis l'air merveilleux de Kinshasa me remet d'aplomb. 4 jours d'Angoulême, 4 jours de fièvre, et je n'aurai ramené nul fauve au Congo.