Je n'y étais pas, je le regrette amèrement. Kanyar, la revue littéraire imaginée par André, a été lancée hier soir au Monte-en-l'air. Il y avait des samoussas, des bouchons, des écrivains (en herbe ou pas).
Maintenant, il faut l'acheter cette revue. Cliquez dans les liens à Revue Kanyar, tout est expliqué.
samedi 27 avril 2013
jeudi 25 avril 2013
Le triomphe de la soumission
Geneviève Fioraso est ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. Mme Fioraso a eu deux idées géniales : enseigner l'anglais dès la maternelle, et imposer des cours en anglais à l'université.
«Si nous n’autorisons pas les cours en anglais, aurait-elle dit, nous n’attirerons pas les étudiants de pays émergents comme la Corée du Sud et l’Inde. Et nous nous retrouverons à cinq à discuter de Proust autour d’une table, même si j’aime Proust…»*
J'imagine que c'est le fameux modèle scandinave : tu parles une langue tellement minoritaire, qu'il vaut mieux utiliser l'anglais, la langue des winners**.
C'est tellement con, tellement insupportable comme idée, que j'en reste bouche bée.
Moi qui préfère utiliser le français et toutes ses subtilités de registre, je chie à la gueule du projet de loi Fioraso - non, ce n'est pas du Proust.
On parle de ce projet de loi ici, là et encore là
** formule particulièrement stupide d'ailleurs, car soit Mme Fioraso considère que l'un des plus grands écrivains mondiaux ne nécessite pas que l'on discute de son oeuvre, soit elle considère qu'on devrait le faire en anglais - ce qui est, en littérature, un non-sens absolu.
* et je préfère de loin les rappeurs français aux rockeurs français pour cette raison là : ils n'ont pas abdiqué, ils disent quelque chose, ils ne se la pètent pas en globish merdeux.
«Si nous n’autorisons pas les cours en anglais, aurait-elle dit, nous n’attirerons pas les étudiants de pays émergents comme la Corée du Sud et l’Inde. Et nous nous retrouverons à cinq à discuter de Proust autour d’une table, même si j’aime Proust…»*
J'imagine que c'est le fameux modèle scandinave : tu parles une langue tellement minoritaire, qu'il vaut mieux utiliser l'anglais, la langue des winners**.
C'est tellement con, tellement insupportable comme idée, que j'en reste bouche bée.
Moi qui préfère utiliser le français et toutes ses subtilités de registre, je chie à la gueule du projet de loi Fioraso - non, ce n'est pas du Proust.
On parle de ce projet de loi ici, là et encore là
** formule particulièrement stupide d'ailleurs, car soit Mme Fioraso considère que l'un des plus grands écrivains mondiaux ne nécessite pas que l'on discute de son oeuvre, soit elle considère qu'on devrait le faire en anglais - ce qui est, en littérature, un non-sens absolu.
* et je préfère de loin les rappeurs français aux rockeurs français pour cette raison là : ils n'ont pas abdiqué, ils disent quelque chose, ils ne se la pètent pas en globish merdeux.
mercredi 24 avril 2013
Le Kamanyola
Et enfin, le Kamanyola.
Sans lieutenant Paulin, pas d'accès aux chantiers navals de Ndolo. Il est bientôt 18 heures, le chantier est fermé - si tant est qu'il y ait eu des travailleurs un peu plus tôt - et la lumière de la fin de journée est parfaite pour découvrir le Kamanyola.
Mais qu'est-ce qu'il nous emmerde avec son Kamanyola celui-là ? Eh bien, mes petits, le Kamanyola est un bateau mythique, c'était le yacht personnel de Mobutu, avec lequel il montait et descendait le fleuve, et qui lui servait même de demeure permanente à la fin de son règne. Le Kamanyola, anciennement le "Léopard", était d'une certaine manière le symbole du Zaïre mobutiste : bateau immense, au luxe tapageur, avec disait-on boite de nuit intégrée, il possédait un héliport et une cave à vins fameuse.
Stephen Smith, il y a plus de 20 ans, racontait une remontée du fleuve ici.
Colette Braeckman visitait le bateau juste après le changement de régime ici.
Alors, à deux pas du fleuve qui charrie ses îles végétales, je ne peux qu'admirer le géant sur cales, et l'imaginer remonter le Congo jusqu'à Mbandaka, Lisala, Bumba ou Kisangani.
Gare Centrale
Des rails, il y en a partout dans Kin : sur Poids-Lourds, le long de la Gombe, au beach Ngobila, sur la route de Matadi et évidemment entre gare Centrale et l'aéroport de Ndjili. Je dis évidemment, parce que Gare Centrale-Ndjili est le dernier tronçon de chemin de fer à encore fonctionner (bien que régulièrement le gouvernement annonce la remise en service d'autres segments).
Une journée au zoo
Ben me téléphone et me dit "ça te dit d'aller voir le bateau de Mobutu ?", ben ouais, ça me dit. Il vient donc me chercher, en compagnie du lieutenant Paulin et d'un autre militaire congolais dont j'ai oublié le nom (en -ain aussi, genre Sylvain ou Firmain), mais lieutenant Paulin souhaite que nous fassions d'abord un tour au zoo de Kinshasa. Ben y est déjà allé plusieurs fois, mais moi jamais, ça tombe bien.
Le zoo de Kinshasa est connu mondialement pour avoir été un des lieux où dormaient les Benda Bilili à l'époque où ils étaient SDF. Les quelques amis qui y avaient été m'en avaient fait une description un peu effrayante, celle d'un mouroir pour animaux.
C'est un peu le cas, mais pas complètement. D'abord, le zoo est bien plus vaste que j'imaginais, ensuite on y trouve une variété d'animaux assez étonnante (ce n'est pas Vincennes, Sydney ou Johannesburg ok, mais c'est pas si mal pour une ville ou un pays au fond du gouffre).
Les singes (cercopithèques, chimpanzées etc.) en sont de loin les locataires les plus nombreux. Evidemment, derrière leurs barreaux, dans leurs cages vétustes, ils tirent un peu la gueule.
Plus loin, on trouve des petits mamifères : genettes, civettes, porcs-épics, chacals (amochés), servals, et léopards.
mardi 23 avril 2013
Un lycée français ne ferme jamais
A Bangui, la situation, depuis la prise de pouvoir par la Seleka, ne cesse de se dégrader. La semaine dernière "les pillages et les tirs ont fait une vingtaine de morts et mardi il y a eu le lynchage d'éléments de la Seleka" (RFI), et "pour Nicolas Tiangaye (premier ministre de RCA), tout est à reconstruire en Centrafrique et la situation sécuritaire est tellement catastrophique qu’un quart de la population a fui la capitale pour se réfugier dans la brousse"(RFI toujours - qui d'autre ?).
Tout à l'heure, j'ai discuté (via FB) avec une copine collègue du lycée français de Bangui, elle m'a décrit la situation terrifiante d'une ville aux mains d'enfants soldats qui terrorisent la population, d'hommes du Nord qui pillent, qui violent, de coups de feu continuels.
Les profs du lycée ne sortent plus, se sont regroupés les uns chez les autres, ont été pillés pour certains, conjoints et enfants sont partis, les classes sont évidemment désertées (ne restent que les élèves centrafricains qui n'ont pas pu s'enfuir). Mais le lycée fonctionne, car un lycée français ne ferme jamais, c'est la règle.
Au passage, Colette Braeckman ne manque pas de faire un parallèle avec la situation en RDC (ici).
vendredi 19 avril 2013
Soirée Kanyar !
Soirée de lancement de Kanyar
le vendredi 26 mai à partir de 18h30 à la librairie Le
Monte-en-l'Air, à Paris, XXe.
Des infos pour s'y rendre ici : http://montenlair.wordpress.com/about/
(tu peux découper ton écran pour obtenir l'invitation)
Des infos pour s'y rendre ici : http://montenlair.wordpress.com/about/
(tu peux découper ton écran pour obtenir l'invitation)
Lastman bande (-annonce)
Bastien Vivès et ses copains inventent la bande-annonce débile de leur nouvelle bd : #trashtv, #geeks, #puceaux, #golri, #boobs, #djeuns
(c'est en 4 épisodes, vous trouverez les 3 autres vous-mêmes)
(c'est en 4 épisodes, vous trouverez les 3 autres vous-mêmes)
lundi 15 avril 2013
Lire les voleurs de Carthage
Depuis quelques albums, Thierry Caro m'envoie des critiques jubilatoires. Je ne sais pas si Thierry aime ou pas mes histoires, au final, mais je m'en fiche, ce qui m'intéresse par dessus tout, c'est la qualité de sa lecture : il s'empare du récit, de son fonctionnement, et brode dessus ses propres envies, ses attentes frustrées, développe les motifs esquissés, suggérés (ou pas). En fait, Thierry Caro fait une vraie lecture créative de mes livres - des livres en général - et de ce point de vue, devrait servir de modèle à tous les critiques de bd que l'on trouve sur le net.
Voici son mail, reproduit in-extenso :
Le choix du cadre est parfait. L'idée de placer l'action à Carthage alors que la cité va tomber ne pouvait que me plaire : je suis un grand joueur de Civilization et tout le vocabulaire historique, tactique et stratégique qui vient avec une histoire comme celle-ci me plaît : il y a un siège, des responsables politiques aux titres incroyables, des intérêts divergents. Tout cela est exotique, passionnant et très bien rendu par le dessin et les couleurs. En bref, l'ambiance générale est le grand point positif de l'album. J'avais d'ailleurs particulièrement aimé, dans le même genre de contexte mais pas exactement, puisque nous sommes alors en Egypte quelques siècles plus tard, le film espagnol Agora, que je te conseille vivement si tu ne le connais pas.
L'idée de placer dans un tel cadre un scénario de heist movie n'est pas mauvaise, je dirais même bonne, mais il y a quand même deux déceptions.
La première, c'est la gestion un peu lâche de la mécanique propre à ce genre de scénario. Je m'explique. Dans ce genre d'histoires, il y a toujours au moins une séquence où le plan des voleurs est exposé et une autre où ils le mettent en branle et passent à l'action. Or, l'exposition du plan des cambrioleurs dit souvent tout de la suite : si lorsque le plan est présenté, on voit d'avance et longuement ce qui devrait se passer si tout fonctionne, alors on sait que ça ne va probablement pas fonctionner, car le scénariste ne va pas montrer deux fois la même chose. Ici, justement, tu montres tout d'avance, pages 42 et 43. On sait donc que le plan va foirer, mais on s'attend à voir la différence, le détail qui fait tout basculer. Le plaisir du lecteur est là : comparer le prévu et l'arrivé, l'avant et l'après, dans un jeu des sept erreurs qu'il tient pour édifiant. Car lui aussi, après tout, veut connaître la recette pour voler un trésor, et ce qui peut lui apprendre des erreurs à ne pas commettre le fascine. Or, ton album ne nous propose jamais complètement la vue de la mise en oeuvre effective du plan. La ville est attaquée, et on n'a dès lors pas l'occasion de voir la variation entre ce qui était annoncé et ce qui a eu lieu. Dans un sens, c'est original, mais c'est quand même un peu frustrant.
Le second problème, plus important, et plus tôt dans l'album, est de voir l'histoire se transformer en casse après avoir commencé sur une autre promesse. En effet, quand j'ai lu les premières pages, j'ai tout de suite vu la triple référence aux Mille et une Nuits : le contexte oriental, la bande de voleurs et la jeune femme qui conte à son violeur potentiel des histoires incroyables pour qu'il épargne sa virginité et sa vie. Vu que c'est pour moi une référence absolue, à laquelle d'ailleurs je réfléchis beaucoup, ça ne pouvait pas mieux débuter. Mais ça posait aussi un horizon d'attente : je m'attendais à ce que le personnage de Tara s'emploie pendant tout le reste de l'album à inventer sans cesse de nouvelles histoires pour mieux repousser son prétendant gaulois. Or, elle ne prend pas vraiment en charge la narration après ça, ce qui l'empêche de devenir le narrateur déficient qu'elle était pourtant superbement programmée à devenir. Ainsi, sa version des faits - "je vais cambrioler le temple" - est confirmée par le vieillard qui le garde. Elle aurait dû être plus complexe que ça et avoir menti.
Alors certes, on voit bien par le dessin de certaines de ses attitudes que ses véritables intentions n'ont pas forcément été toutes révélées dans ce premier tome, qu'elle a son propre plan, mais en attendant, les potentialités d'un personnage truqueur pour les autres héros comme pour le lecteur sont un peu platement abandonnées dans ce volume dont la narration devient ensuite plus linéaire. Je veux dire par là qu'on n'a finalement pas besoin de relecture alors que tout annonçait une mystification.
Je disais que j'ai beaucoup réfléchi aux Mille et Nuits. Voici une idée qui me paraît capitale à ce stade : récit et viol sont intimement liés. Non seulement parce que de nos jours un viol consommé donne souvent lieu à la confrontation de deux récits devant la police ou la justice, mais aussi parce qu'avant même qu'il n'ait lieu la victime, comme Shéhérazade, peut lutter par des récits pour préserver son intégrité, en l'occurrence sa virginité. Cette dernière, dans les Mille et une Nuits, est un enjeu. Ici, tu fais également de la virginité de Tara un enjeu. Mais tu n'exploites pas spécialement cet enjeu en le réduisant ensuite à un simple mécanisme comique : Horodamus est obsédé. Dommage.
Il aurait selon moi mieux valu jouer de ça sérieusement. Que Tara raconte des bobards, pour continuer d'être une cousine littéraire de Shéhérazade, luttant pour sa vertu. Et puis surtout mieux filer une métaphore déjà frissonnante entre sa pénétration sexuelle et celle du temple dont elle devient la gardienne, que finalement les héros essaient aussi de pénétrer.
Car tout était là pour ça : la séduction de Tara par Horodamus, l'assaut du temple par les cambrioleurs et même le siège de la ville par les légions romaines sont in fine du même ordre, des tentatives pour entrer de force et profaner. En bref, il y avait là de quoi créer un vertige encore plus grand qu'actuellement en activant un incroyable emboîtement. Le viol d'une vierge par un cambrioleur dans une ville assiégée, c'est finalement un viol dans un viol dans un viol. Principe sans fond qui expliquerait pourquoi Carthage est aujourd'hui en ruines et, puisque tu y es né, ne manquerait pas de fournir matière à réflexion au psychanalyste : cette structure narrative pose comme un problème la question de ton origine véritable. Est-elle carthaginoise si tout à Carthage n'est que viol étranger ? Question d'autant plus vertigineuse que les mêmes interrogations relatives à la parenté de l'enfant sont valables dans l'autre région d'origine du récit, cette Réunion où le métissage est roi et qui a peut-être inspiré à l'habile scénariste ces quelques dialogues où l'esclavage des personnages est évoqué, d'ailleurs pour être lui-même questionné.
En tout cas, je remarque que cette réflexion sur l'origine que je crois déceler, tu refuses de la rendre trop violente. Il y a de beaux combats, certes, mais toutes les formes de profanation mises en scène échouent : le viol de la jeune femme, le cambriolage du temple et le siège de la ville. Tu choisis l'échec de la gauloiserie qu'incarne le Gaulois face à la pruderie que symbolise la jeune femme et la défaite de la Famille dysfonctionnelle que caricaturent les voleurs contre le pur célibat que représentent les vestales. Enfin, la sournoise attaque des Romains achoppe contre la défense de l'éléphant, pour le coup très littérale, mais pas sans que cette dernière, symbole de virilité, soit elle-même anéantie. De sorte que dans le titre Les Voleurs de Carthage l'absence d'un I bien phallique est finalement puissamment motivée. Tu annonces toute l'intrigue dès la couverture : quels qu'ils soient, les v(i)oleurs de Carthage ne passent pas.
Voici son mail, reproduit in-extenso :
Le choix du cadre est parfait. L'idée de placer l'action à Carthage alors que la cité va tomber ne pouvait que me plaire : je suis un grand joueur de Civilization et tout le vocabulaire historique, tactique et stratégique qui vient avec une histoire comme celle-ci me plaît : il y a un siège, des responsables politiques aux titres incroyables, des intérêts divergents. Tout cela est exotique, passionnant et très bien rendu par le dessin et les couleurs. En bref, l'ambiance générale est le grand point positif de l'album. J'avais d'ailleurs particulièrement aimé, dans le même genre de contexte mais pas exactement, puisque nous sommes alors en Egypte quelques siècles plus tard, le film espagnol Agora, que je te conseille vivement si tu ne le connais pas.
L'idée de placer dans un tel cadre un scénario de heist movie n'est pas mauvaise, je dirais même bonne, mais il y a quand même deux déceptions.
La première, c'est la gestion un peu lâche de la mécanique propre à ce genre de scénario. Je m'explique. Dans ce genre d'histoires, il y a toujours au moins une séquence où le plan des voleurs est exposé et une autre où ils le mettent en branle et passent à l'action. Or, l'exposition du plan des cambrioleurs dit souvent tout de la suite : si lorsque le plan est présenté, on voit d'avance et longuement ce qui devrait se passer si tout fonctionne, alors on sait que ça ne va probablement pas fonctionner, car le scénariste ne va pas montrer deux fois la même chose. Ici, justement, tu montres tout d'avance, pages 42 et 43. On sait donc que le plan va foirer, mais on s'attend à voir la différence, le détail qui fait tout basculer. Le plaisir du lecteur est là : comparer le prévu et l'arrivé, l'avant et l'après, dans un jeu des sept erreurs qu'il tient pour édifiant. Car lui aussi, après tout, veut connaître la recette pour voler un trésor, et ce qui peut lui apprendre des erreurs à ne pas commettre le fascine. Or, ton album ne nous propose jamais complètement la vue de la mise en oeuvre effective du plan. La ville est attaquée, et on n'a dès lors pas l'occasion de voir la variation entre ce qui était annoncé et ce qui a eu lieu. Dans un sens, c'est original, mais c'est quand même un peu frustrant.
Le second problème, plus important, et plus tôt dans l'album, est de voir l'histoire se transformer en casse après avoir commencé sur une autre promesse. En effet, quand j'ai lu les premières pages, j'ai tout de suite vu la triple référence aux Mille et une Nuits : le contexte oriental, la bande de voleurs et la jeune femme qui conte à son violeur potentiel des histoires incroyables pour qu'il épargne sa virginité et sa vie. Vu que c'est pour moi une référence absolue, à laquelle d'ailleurs je réfléchis beaucoup, ça ne pouvait pas mieux débuter. Mais ça posait aussi un horizon d'attente : je m'attendais à ce que le personnage de Tara s'emploie pendant tout le reste de l'album à inventer sans cesse de nouvelles histoires pour mieux repousser son prétendant gaulois. Or, elle ne prend pas vraiment en charge la narration après ça, ce qui l'empêche de devenir le narrateur déficient qu'elle était pourtant superbement programmée à devenir. Ainsi, sa version des faits - "je vais cambrioler le temple" - est confirmée par le vieillard qui le garde. Elle aurait dû être plus complexe que ça et avoir menti.
Alors certes, on voit bien par le dessin de certaines de ses attitudes que ses véritables intentions n'ont pas forcément été toutes révélées dans ce premier tome, qu'elle a son propre plan, mais en attendant, les potentialités d'un personnage truqueur pour les autres héros comme pour le lecteur sont un peu platement abandonnées dans ce volume dont la narration devient ensuite plus linéaire. Je veux dire par là qu'on n'a finalement pas besoin de relecture alors que tout annonçait une mystification.
Je disais que j'ai beaucoup réfléchi aux Mille et Nuits. Voici une idée qui me paraît capitale à ce stade : récit et viol sont intimement liés. Non seulement parce que de nos jours un viol consommé donne souvent lieu à la confrontation de deux récits devant la police ou la justice, mais aussi parce qu'avant même qu'il n'ait lieu la victime, comme Shéhérazade, peut lutter par des récits pour préserver son intégrité, en l'occurrence sa virginité. Cette dernière, dans les Mille et une Nuits, est un enjeu. Ici, tu fais également de la virginité de Tara un enjeu. Mais tu n'exploites pas spécialement cet enjeu en le réduisant ensuite à un simple mécanisme comique : Horodamus est obsédé. Dommage.
Il aurait selon moi mieux valu jouer de ça sérieusement. Que Tara raconte des bobards, pour continuer d'être une cousine littéraire de Shéhérazade, luttant pour sa vertu. Et puis surtout mieux filer une métaphore déjà frissonnante entre sa pénétration sexuelle et celle du temple dont elle devient la gardienne, que finalement les héros essaient aussi de pénétrer.
Car tout était là pour ça : la séduction de Tara par Horodamus, l'assaut du temple par les cambrioleurs et même le siège de la ville par les légions romaines sont in fine du même ordre, des tentatives pour entrer de force et profaner. En bref, il y avait là de quoi créer un vertige encore plus grand qu'actuellement en activant un incroyable emboîtement. Le viol d'une vierge par un cambrioleur dans une ville assiégée, c'est finalement un viol dans un viol dans un viol. Principe sans fond qui expliquerait pourquoi Carthage est aujourd'hui en ruines et, puisque tu y es né, ne manquerait pas de fournir matière à réflexion au psychanalyste : cette structure narrative pose comme un problème la question de ton origine véritable. Est-elle carthaginoise si tout à Carthage n'est que viol étranger ? Question d'autant plus vertigineuse que les mêmes interrogations relatives à la parenté de l'enfant sont valables dans l'autre région d'origine du récit, cette Réunion où le métissage est roi et qui a peut-être inspiré à l'habile scénariste ces quelques dialogues où l'esclavage des personnages est évoqué, d'ailleurs pour être lui-même questionné.
En tout cas, je remarque que cette réflexion sur l'origine que je crois déceler, tu refuses de la rendre trop violente. Il y a de beaux combats, certes, mais toutes les formes de profanation mises en scène échouent : le viol de la jeune femme, le cambriolage du temple et le siège de la ville. Tu choisis l'échec de la gauloiserie qu'incarne le Gaulois face à la pruderie que symbolise la jeune femme et la défaite de la Famille dysfonctionnelle que caricaturent les voleurs contre le pur célibat que représentent les vestales. Enfin, la sournoise attaque des Romains achoppe contre la défense de l'éléphant, pour le coup très littérale, mais pas sans que cette dernière, symbole de virilité, soit elle-même anéantie. De sorte que dans le titre Les Voleurs de Carthage l'absence d'un I bien phallique est finalement puissamment motivée. Tu annonces toute l'intrigue dès la couverture : quels qu'ils soient, les v(i)oleurs de Carthage ne passent pas.
dimanche 14 avril 2013
Kanyar, souscrivez !
Comme au bon vieux temps, comme quand nous étions jeunes, comme quand le siècle précédent n'était pas mort, comme quand nous croyions inventer la bande dessinée réunionnaise, André m'a dit "tiens, je vais lancer une revue littéraire, ça te dit ?". Putain oui, ça me dit, j'ai répondu.
Alors il l'a fait, ça s'appelle Kanyar, c'est signé de plein de gens - certains que je connais, d'autres non -et ça sort à la fin de ce mois.
Faire une revue littéraire, une vraie, en vrai papier, pas de numérique, pas de pub, même pas d'images, je trouve ça follement classe, et il n'y avait sans doute qu'André pour se lancer là-dedans.
Le communiqué :
une belle revue de création littéraire
Nous avons le plaisir de vous informer de la parution, à la fin de ce mois d’avril, du premier numéro d’une revue littéraire indépendante, sous le doux nom réunionnais de Kanyar.
Le second numéro paraîtra en novembre 2013. Son objectif est de
contribuer à dynamiser la création littéraire sous toutes ses formes à
l'île de La Réunion en restant ouvert aux créations du monde entier qui
l'entoure.
deux cent huit pages
Pour lancer cette aventure, des auteurs ont confié à la revue Kanyar des nouvelles, des récits ou encore des scénarios, tous inédits et surprenants, rassemblés dans un ouvrage de 208 pages et d’un beau format de 180 x 240 x 14 mm. L’étonnante couverture est de l’illustrateur Emmanuel Brughera. Vous découvrirez, au sommaire de ce premier numéro, par ordre d’apparition : Tulé ! Tulé ! d’Emmanuel Genvrin - Double salto arrière de Pierre-Louis Rivière - Une île, immonde et Un galet dans le pare-brise d’André Pangrani - Plaid de Marie Martinez - Nationale 4 d’Emmanuel Gédouin - Dakar blues de David-Pierre Fila - La méthodologie du jeu d’acteur et Ulimina de Bertrand Mandico - Les garçons d’Edward Roux - Longing (Désir) en version bilingue (anglais-français) d’Elina Löwensohn - Le pouvoir de Cordélia de Xavier Marotte - Chambre verte de Cécile Antoir - Le Prophète et la Miss de l’Équateur d’Olivier Appollodorus (dit Appollo).
profitez du tarif de souscription et soutenez la création indépendante
Le
prix de vente public en France hexagonale, hors frais éventuels
d’expédition, sera de 19 € ttc par numéro. Je vous propose de bénéficier
jusqu’au 30 avril 2013 d’un tarif de souscription de 30 € ttc pour recevoir directement chez vous, frais de port compris pour l’île de La Réunion et la France hexagonale*, les deux numéros à paraître cette année, soit un petit 15 € pour un Kanyar à la maison ! En souscrivant à l’aide du bulletin ci-joint, vous contribuez aussi, et surtout, à renforcer l’indépendance de la revue qui ne compte ni sponsor ni annonceur publicitaire. Et vous recevrez en cadeau un beau marque-page.
Nous nous tenons à votre disposition pour toutes informations complémentaires.
Dans l’espoir de vous compter parmi nos futurs lecteurs et avec nos remerciements,
Très cordialement,
André Pangrani
Directeur de publication de Kanyar
+33 642 632 799
Retrouvez l’actualité de la revue Kanyar sur www.revuekanyar.com
Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu wa Za Banga
Photos de Mobutu, et du Zaïre, piquées sur le FB de Barly Baruti. Attention, il y a entre autres du Johnny dedans.
La malédiction de Kintambo
Il y a un an je voyais Gudzila, le champion angolais triompher sur le ring de Kintambo. Quelques mois après, il mourait dans un accident de voiture à Luanda Sul.
Il y a quelques mois, je voyais Nanda Steve perdre son titre face à Etats-Unis au stade vélodrome de Kintambo. Quelques temps après, j'apprends (de source non-officielle) qu'il serait mort de maladie chez lui. Je ne sais pas si cette dernière mort est avérée (c'est peut-être qu'une sale rumeur), mais si c'était le cas, je crois qu'on tiendrait là un retour de fétiches assez spectaculaire.
Fred aussi est mort, mais il ne pratiquait pas à ma connaissance le catch avec fétiches congolais.
samedi 13 avril 2013
Je n'ai pas peur de personne
Un clip rigolo, que Li-An m'a fait découvrir, et que j'ai fait découvrir à La Crainte (qui sur-kiffe).
Et une tof de trois bandidos de Bourbonnos (early 00's à vue de nez) : Margerin, Mézigues et Ptiluc :
Et une tof de trois bandidos de Bourbonnos (early 00's à vue de nez) : Margerin, Mézigues et Ptiluc :